C'est un drôle de film,
pas si drôle ou juste un peu, en de rares occasions et alors
c'est un humour cruel et radical qui se manifeste, appuyant sur
l'aspect dérisoire et pathétique de certaines situations...
C'est un film qui a le goût et l'effet d'un alcool fort. Un
film en forme de coup de fouet, un grand courant d'air froid capable
de chasser les poux de l'existence. Dans cette histoire de deuil,
d'amour inconditionnel, la colère peut être salutaire,
balayer la peine... juste la balayer, pas la faire disparaitre,
elle est comme la poussière, elle revient, elle reviendra.
Le personnage principal, pris au piège de la jalousie, de
la rancœur, est accompagné d'une petite fille, sa petite
fille, et cette dernière malgré sa jeunesse est probablement
la plus sage des deux, la plus sereine. Elle aide son grand-père
sans vraiment le savoir, elle est une arme absolue face au désespoir
possible et pourtant sans aucune mièvrerie (mais alors vraiment
aucune !). Drôle de relation entre ces deux-là. Et
sans doute rêverait-on d'être le grand-père pour
avoir une petite fille comme celle du film, ou bien la petite fille
elle-même, pour avoir un grand-père qui ne vous prend
pas pour une gamine, capable de vous raconter des histoires tout
à fait épouvantables et de vous aimer profondément.
Le récit laisse des zones d'ombre parmi tout ce blanc, des
drôles de questions sur cette grand-mère aux allures
de jeune femme, ou de fantôme... sur ce flic qui ne l'est
plus mais tout de même encore un peu... sur cette maison improbable,
allégorie de l'état d'esprit de son propriétaire,
fermée et immuable face aux saisons, puis s'ouvrant et s'éclairant
tout en conservant un aspect extra brut.
Oui, un drôle de film qui reste en mémoire, brutal
et tendre, étrange et lumineux, rugueux, inconfortable et
revigorant, absolument pas attendu, comme ces cris suivis de rires
salutaires dans un tunnel alors qu'on pourrait croire les personnages
au fond du trou...