Je ne suis pas un salaud *

Emmanuel Finkiel

L'histoire

Lorsqu’il est violemment agressé dans la rue, Eddie désigne à tort Ahmed, coupable idéal qu’il avait aperçu quelques jours avant son agression. Alors que la machine judiciaire s’emballe pour Ahmed, Eddie tente de se relever auprès de sa femme et de son fils et grâce à un nouveau travail.

Avec

Nicolas Duvauchelle, Mélanie Thierry, Driss Ramdi, Nicolas Bridet, Johann Soulé

Sorti

le 24 février 2016


La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

L'abîme d'une vie

 

Dès les premières secondes, les images et les sons imposent une ambiance oppressive, à la musique saccadée succède le bruit des marteaux piqueurs, les plans rapprochés qui emprisonnent les personnages sont montés de façon extrêmement serrée. Le ton est donné, ce n'est pas un film tendre, il n'y aura pas de douceur, à l'image du personnage principal au prénom américain, Eddie, belle gueule (Nicolas Duvauchelle), tendu, nerveux, sur le qui-vive, la colère à fleur de peau, toujours prêt à dégainer, à défaut de flingue, une répartie pas forcément cinglante mais certainement injurieuse, un regard où la haine n'est jamais bien loin. Il est incroyable, Duvauchelle. Il parvient à maintenir ce personnage tout au long du film, à le faire vivre malgré ses plaies (au propre comme au figuré), à lui donner même une possibilité d'empathie, à ne pas le faire passer pour un abruti. Il y a des nuances dans son jeu tout en tension, on y voit une part d'incompréhensible dans ses faits et gestes qui le fait échapper au cliché, qui le rend humain malgré tout.
Les personnages qui l'entourent et qui lui apportent de la lumière ont tous aussi leur part de sombre, parfois invisible mais bien présente. Le fils n'a rien de l'enfant chéri, il est formidablement vivant et pourtant s'est insérée en lui une partie de la colère de son père. Le patron, jeune, beau, chaleureux, bienveillant, n'est jamais tout à fait sympathique malgré toutes ses qualités, on sent en lui quelque chose de trouble, que le film a l'intelligence de ne jamais montrer. Et puis il y a la femme (Mélanie Thierry), rayonnante, lumineuse, compréhensive mais dotée d'un instinct de vie qui lui permet de se sauver. L'amour, réel, qu'elle ressent pour Eddie, c'est précisément sa part de sombre. Elle est la vie, pas tout à fait légère mais tendant vers le bonheur, et pourtant elle est inexorablement attirée par son contraire, par l'abîme que représente la profonde dépression de son homme.
Le film ne serait que le portrait, socialement saisissant et politiquement pas tout à fait correct, d'un homme en rupture, basculant sans retour possible vers une folie autodestructrice, cela n'aurait qu'un intérêt limité. Il est semé d'ambiguïtés, laissant suffisamment de questions sans réponses pour éveiller la curiosité du spectateur. La fin fait brutalement glisser le récit dans une radicalité qui n'était peut-être pas tout à fait nécessaire. Certes, elle questionne, encore. Mais elle fait perdre au film une part de sa subtilité, de ses mystères…

 

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