Un amour impossible dont les deux
êtres épris l’un de l’autre sont issus de
communautés ennemies, un frère belliqueux, une atmosphère
de tension intense… cela ne vous rappelle rien ? Ici, c’est
la ville de Jaffa qui remplace celle de Vérone, les évènements
tragiques ne sont pas exactement les mêmes, et c’est tant
mieux : le récit en est presque crédible, et bien sûr
très émouvant. En évitant le spectaculaire, en
privilégiant les scènes intimes entre une poignée
de personnages, en donnant un éclairage violemment contrasté
sur les relations conflictuelles au sein d’une famille (on se
croirait parfois dans un Pialat oriental) tout en refusant le voyeurisme
(la scène d’hôpital, inévitable, est filmée
de loin, sans gros plan, avec une retenue poignante), la réalisatrice
signe une œuvre d’une grande unité de ton, à
la beauté âpre et lumineuse.
Probablement, on pourra lui reprocher un lissage du côté
politique, une universalisation du propos et quelques concessions
au spectateur occidental qui n’est pas complètement déséquilibré
par ce récit, juste dignement ému, ce qui n’est
déjà pas si mal.
Les personnages existent, évoluent, ont des trajectoires qui,
sans être véritablement surprenantes, ne sont pas tout
à fait celles à quoi on pourrait s’attendre. Même
l’immense Ronit Elkabetz parvient à faire oublier son
statut de presque star, vautrée dans son canapé, se
faisant masser les pieds comme une diva d’appartement.
Le temps qui passe fait son œuvre et donne encore plus de relief
à ce beau film qui laisse beaucoup d’images en mémoire,
comme la dernière, signe d’espérance malgré
tout.