Ce n'est pas du cinéma
spectaculaire, avec effets d'images, de montage ou d'éclairage.
C'est du cinéma entièrement basé sur un récit
ultra réaliste et dont on se demande s'il est véridique.
Vérification faite, non, pas de mention "tiré
d'une histoire vraie". Le début fait craindre un aspect
schématique, avec des personnages un brin caricaturaux, une
situation conflictuelle idéale pour poser un problème
et observer comment il peut se résoudre (ou pas). Puis, au
fur et à mesure de l'avancée du récit, il y
a de plus en plus d'enjeux, et tout devient complexe, ambigu. Il
n'y a pas les victimes et les agresseurs, les roublards et les innocents,
les têtus et les conciliants. Tout est entremêlé,
les frontières sont fluctuantes, le bien et le mal deviennent
des concepts bien trop simplistes pour tenter d'avoir un avis sur
les agissements et les arguments des uns et des autres. L'Histoire
du Liban est bien sûr au centre, les convictions religieuses
ne sont pas ignorées mais elles sont reléguées
au second plan, il s'agit de politique, d'honneur, de devoir de
mémoire, mais au final, le cheminement des deux personnages
principaux a quelque chose de psychanalytique et donc de très
universel. Quelque chose surgit chez l'un, de si profondément
enfoui qu'il parvient par son exhumation à éclairer
ses outrances. L'autre le comprend et au terme d'une scène
formidablement bien écrite, fait basculer le rapport.
C'est passionnant à plus d'un titre, c'est autant un film
"de procès" qu'un polar des convictions, qu'une
exploration des facultés de pardon, de vengeance ou d'oubli.
La direction d'acteurs est bien plus subtile qu'il n'y paraît
de prime abord et la mise en scène est invisible, toute entière
consacrée à l'histoire. Il faudrait revoir le film
pour sans doute découvrir que la caméra fait quelques
merveilles pour nous faire entrer à ce point dans cette intrigue,
source inépuisable de discussions post-projection.