Les innocentes

Anne Fontaine

L'histoire

Pologne, décembre 1945. Mathilde Beaulieu, une jeune interne de la Croix-Rouge chargée de soigner les rescapés français avant leur rapatriement, est appelée au secours par une religieuse polonaise.D’abord réticente, Mathilde accepte de la suivre dans son couvent où trente Bénédictines vivent coupées du monde. Elle découvre que plusieurs d’entre elles, tombées enceintes dans des circonstances dramatiques, sont sur le point d’accoucher.

Avec

Lou de Laâge, Vincent Macaigne, Agata Buzek, Agata Kulesza

Sorti

le 10 février 2016


La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

Baby blues

 

Quelle histoire ! Inspirée de faits réels et du témoignage d'une femme médecin, Madeleine Pauliac, qui a tenu un journal intime lors d'une mission en Pologne, et qui a sans doute vécu une partie de ce qui est montré dans le film. Une partie seulement, puisque le personnage est largement remanié. Jeune interne dans la fiction d'Anne Fontaine, médecin chef déjà expérimentée dans la réalité. On imagine que le reste a été traité de même, mais ces arrangements avec la vérité (et qu'est-ce que la vérité ?) ne nuisent pas au propos du film : montrer comment la foi en Dieu résiste (ou pas) à l'impensable horreur qui aboutit pourtant à quelques folles espérances. Lorsque des femmes s'engagent comme elles le font dans la religion, elles font vœu de chasteté et n'imaginent pas, ne peuvent absolument pas concevoir qu'elles pourraient être mères. Et pourtant, elles appellent toutes l'une d'entre elle, leur "mère supérieure". Les religieux ont un vocabulaire assez étonnant, quand on y pense… Un petit détour par le divan, non ? Non, hors sujet. D'accord. Continuons.
Le film ne s'intéresse pas qu'à ces religieuses confrontées à des questions qui les dépassent. Le personnage principal est une très jeune femme, médecin, non croyante mais munie d'une autre foi, celle de l'Humanité et de l'impossibilité de ne pas venir en aide aux êtres en souffrance. Elle est issue d'un milieu ouvrier et communiste, un peu féministe, un peu rebelle, et surtout vivante. Elle doute de ses amours et de son avenir et c'est sans doute pour cela qu'il y a beaucoup de crédibilité dans sa rencontre avec d'autres femmes qui ont fait le choix déterminé d'une vie d'enfermement et que les évènements dramatiques font basculer dans un questionnement crucial. Si différentes par leurs choix de vie, et pas si éloignées au bout du compte dans leur errements respectifs.
Si l'histoire est effroyable, passionnante, terriblement et malheureusement humaine, le récit est un peu trop sage, exposant presque de façon pédagogique les différents enjeux. Toutes les questions posées sont pertinentes, tous les personnages remplissent leurs rôles prédéfinis, de la mère supérieure d'une rigidité qui tourne au cliché jusqu'à la jeune nonne qui veut rejoindre son fiancé (!), en passant par la mère inférieure (hum, doit pas s'appeler comme ça, disons la sous-chef du couvent) pleine de doutes et ayant connu la vraie vie avant d'entrer dans les ordres, et c'est pour cela qu'elle est plus ouverte… Les soldats russes sont très vilains, le médecin-chef français est très…français (c'est à dire sentimental sans le savoir, drôle et charmeur), les enfants sont très mignons (les bébés qui viennent de naître ont tous déjà entre trois et six mois, c'est quand même plus présentable…), les tenues des nonnes sont drôlement bien repassées et super propres, la route pour aller au couvent est enneigée et parfois interdite par les autorités russes mais pas toujours, ce qui est bien arrangeant pour faire avaler les petites incongruités du scénario.
L'interprétation des actrices polonaises est tout à fait digne et crédible. En revanche, Lou de Laâge semble bien jeune et récite son texte bien plus qu'elle ne le vit, faisant très bien (trop bien pour être honnête) la jeune femme pleine de valeurs, droite dans ses bottes, inattaquable.
Bien sûr, les émotions (particulièrement en fin de projection) peuvent vous submerger, difficile de ne pas laisser venir quelques larmes. Mais tout cela est tout de même très convenu, très correct, exemplaire. Un film un peu trop rigide pour une histoire de folie humaine.

 

Vos commentaires pour ce film

Pologne : forêt, neige, froid.
Couvent : murs, escaliers, couloirs, portes, cellules.
Adapté d'une histoire vraie, les victimes sont condamnées aux silences, portraits de femmes confrontées à leurs peurs, leurs doutes, la complexité humaine.
Les sœurs polonaises jouent leurs rôles, la mère abbesse est habitée par son secret, Lou De Laâge est émouvante, Vincent Macaigne, décalé, apporte un peu de légèreté. Beaucoup de gros plans, peu de musique, l’émotion ne passe pas toujours, la scène finale est surprenante.


Dominique P, le 9 mars 2016

 

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