Au secours, Tati est de retour
! Pour qui n’est pas sensible au cinéaste, ou pire, ne
supporte pas ses gags vaguement poétiques ou piteusement lourds,
l’absence systématique de gros plans et les scénarios
en forme d’alignements de sketches, la nouvelle de sa résurrection,
même en dessin animé, n’a pas déclenché
une vague de bonheur…
Car il s’agit de véritables retrouvailles. Monsieur Hulot
n’est plus, mais le Tatischeff dessiné et animé
par Chomet et son équipe est stupéfiant de ressemblance,
la silhouette, la démarche, l’élégance
empruntée, la fausse discrétion, tout est là
et bien là, dès les premières minutes. Du coup,
l’espoir de retrouver l’univers mystérieux, inquiétant
et pourtant réjouissant des "Triplettes de Belleville"
semble balayé… et puis peu à peu, le charme opère.
Malgré l’uniformité des cadrages (le refus des
gros plans cher à Tati est parfaitement respecté) et
l’absence de dialogues (la communication par regards ou borborygmes
est également reprise à l’identique), le récit
a du rythme, les images lumineuses créent des contrastes et
enfin, le personnage de la jeune fille apporte un contrepoint au caractère
invariable de Hulot-Tatischeff.
Bien plus que l’humour (faiblard…), c’est la mélancolie
légère, la tendresse, la douce bienveillance des personnages
entre eux qui donnent des couleurs au film. On pourra toujours regretter
le manque de surprises dans cette histoire, mais il y a suffisamment
de qualités formelles pour faire de ce film d’animation
un très joli moment de grâce, un peu hors mode, sans
doute plus destiné à des adultes sensibles à
la poésie des rencontres qu’à des enfants avides
de péripéties exaltantes.