C’est une tragédie,
un homme qui envoie son fils à la guerre, pas tout à
fait parce qu’il ne peut pas faire autrement… Le scénario
est plutôt fin, distillant pas mal de doutes, installant des
personnages opaques, aux intentions troubles, dépassés
par les évènements, envahis de remords…
D’où vient alors l’absence totale d’émotion
face à ce récit édifiant, terrible, avec d’une
part les ravages de la mondialisation et d’autre part un conflit
armé qui tous les deux font prendre aux protagonistes des décisions
irréversibles, aux conséquences désastreuses
pour eux-mêmes et leurs proches ? L’histoire se passe
en Afrique, au Tchad, elle pourrait être universelle et toucher
le plus grand nombre. Mais la volonté de ne pas céder
au pathos, de rester sec, empêche sans doute le spectateur d’entrer
en empathie avec cet homme mûr, aimant son fils et tentant d’être
quelqu’un de bien. Cette sécheresse de ton est continue,
même aux pires moments, même lorsque les larmes coulent
des yeux des acteurs, on reste à l’écart, comme
des observateurs de cette lamentable descente aux enfers. Un homme
qui crie ? Justement, il ne crie jamais (ou presque), il se tait le
plus souvent, il reste digne mais, et c’est désolant
d’avoir à le reconnaître, il ne suscite qu’un
intérêt poli et un ennui léger.