Mille visages, c'est beaucoup
dire. On pourrait dire, mille attentions pour suivre l'histoire
tortueuse d'une arnaque financière qui a énormément
fait parler, dans les années 90 en Espagne. Le point de vue
adopté est celui d'un homme de main, pilote de profession,
au courant de quelques uns des mensonges du personnage principal
: Francisco Paesa, un ex agent secret qui a roulé dans la
farine pas mal de monde, et en premier lieu, l'état espagnol.
Ce point de vue, à la fois très proche de l'arnaqueur
en chef mais aussi extérieur (on ne voit pas tous les agissements
de Paesa) permet une double approche, documentaire et semble-t-il
assez proche de la vérité (mais comme toute vérité,
truffée de mensonges…) mais aussi dans le pur style
du film d'arnaque, avec retournements, faux semblants, fausses pistes,
mystères bien cachés puis dévoilés pour
relancer l'intérêt (ah ah, vous avez cru cela ? eh
bien non, c'est pas ça du tout, etc). Le problème,
c'est que le réalisateur prend tout cela très au sérieux.
On peut le comprendre, l'affaire a fait tomber un gouvernement et
a montré que la corruption était encore bien présente
dans un pays qui cherche à l'éradiquer. Mais le plaisir
du spectateur se limite à tenter de suivre, tant bien que
mal (cela dépend du degré de fatigue, de l'heure de
la séance, du moelleux du fauteuil…), une intrigue
qui semble parfois inutilement compliquée. L'humour est pratiquement
absent, le personnage principal n'a aucune flamboyance et n'est
pas attachant, ses relations avec ceux qui l'entourent se révèlent
toutes plus ou moins jouées, il n'a, au fond, pas d'amis,
pas d'amours, pas de valeurs. Mais ce n'est pas un monstre non plus.
Juste un homme qui s'amuse (tout seul, sans nous) à gagner
beaucoup d'argent et à se venger de ceux qui l'ont trahi.