Le problème avec Resnais,
c’est Resnais. Si l’on dit que l’on n’aime
pas ses œuvres, on est un simple d’esprit qui regarde TF1
et préfère les films d’actions, et si au contraire
on avoue apprécier, on est catalogué intellectuel chiant
à mourir. Pourtant, il y a un monde entre les deux, entre le
très ennuyeux "Cœurs" et le réjouissant
"on connaît la chanson"…
Resnais est un réalisateur fidèle à ses acteurs,
et ça aussi, c’est un problème : Dussollier et
Azéma finissent par être pénibles, rejouant toujours
plus ou moins les mêmes personnages, avec à chaque fois
quelques années de plus, un peu de charme en moins…
Ici, dans ces herbes folles, il y a un mélange de réjouissances
et d’objets de consternation. Malgré les critiques dithyrambiques
du Monde et de Télérama (aïe, serait-ce un film
pour critiques professionnels ?) et les avis (très) défavorables
des spectateurs sur les forums, l’aspect volontairement irréel
et absurde ne dérange pas au début, on se laisse aller
au contraire dans cet univers étrange, où le narrateur
(excellent Edouard Baer) lui-même semble hésiter sur
le sens du récit, où les personnages ne révèlent
que très lentement leurs caractéristiques (et encore,
même à la fin, beaucoup de mystères resteront
entiers). La mise en scène est formidablement élégante,
avec des travellings d’une belle fluidité, servie par
une musique tout sauf décorative.
Et puis, lentement mais sûrement, l’intérêt
initial s’émousse, pour s’écrouler définitivement
lorsque les deux personnages se rencontrent pour de vrai. Dès
lors, on a l’impression que Resnais cherche à finir son
film mais ne sait pas comment. À partir de là, tout
ce qui semblait mystérieux, poétique, en apesanteur,
vire au grand n’importe quoi, tant pour ce qui concerne le récit
(les non-dits sont maintenus artificiellement et ne sont plus qu’excédants)
que pour les idées de mise en scène (certaines scènes
sont d’une laideur à pleurer !).
L’ennui prend alors le dessus et on attend la fin, totalement
absurde, ne faisant rire personne, même pas dérangeante…