Habemus Papam *

Nanni Moretti

L'histoire

Tout juste élu, un Pape est en proie au doute...

Avec

Michel Piccoli, Nanni Moretti, Jerzy Stuhr, Renato Scarpa, Margherita Buy

Sorti

le 7 septembre 2011

La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

Le pape est humain ("papa est homo" en latin…)

 

 

 

 

 

 

 

Un autre cinéaste que Nanni Moretti aurait-il pu avoir l'idée d'un sujet pareil ? Un pape nouvellement élu à la surprise générale (dont la sienne) fait une véritable crise d'angoisse face à tout ce qui l'attend, refuse de se montrer à la foule, et s'enfonce dans la dépression…
Cela n'aurait pu être qu'une farce, une occasion de brocarder l'Eglise, une blague anticléricale, plus ou moins acide. De l'humour, il y en a, et pas qu'un peu, mais pas exactement là où on l'attend. L'assemblée des cardinaux est moins décrite sous l'angle religieux qu'en tant que communauté fermée dont tous les membres ont les mêmes convictions, les mêmes références (ou presque), vivant dans un isolement culturel et sentimental. Par petites piques plus attendries que réellement acerbes, Moretti développe une sorte de tendresse dans la façon de montrer ces personnages d'hommes, âgés pour la plupart d'entre eux, avec leurs petits travers, leurs doutes, leur incompréhension face à l'impensable. On est loin de l'idée qu'on peut se faire de prélats compassés, ils sont bien hors du Monde, mais ils sont aussi très humains.
Sur cette base qui ne serait qu'anecdotique si le réalisateur s'en contentait, viennent s'installer des interrogations sur les choix de vie, le destin des hommes, l'amour et la mort, tout ce qui fait le sel (et le poivre) de l'existence. Le personnage du pape malgré lui (joué par un Piccoli formidable, engoncé dans ses habits de cérémonie puis comme libéré, tout en nuances) est beaucoup plus universel qu'on pourrait croire. Ses hésitations, ses enthousiasmes et ses peurs ont quelque chose qui parle à chacun de nous, ce pape qui n'a pas choisi de l'être et ne se sent pas à la hauteur, c'est aussi soi-même, face aux obligations professionnelles, familiales, intimes…
Formidablement riche en évènements, en personnages, en scènes drôles, surprenantes, le film n'oublie pas d'être beau, étonnamment beau. Les décors fastueux, le cérémoniel, les défilés de robes ont une magnificence illuminée par une musique profonde, utilisée avec parcimonie, mais qui semble élever les images, leur ôte le côté parfois ridicule de ces hommes en tissus chatoyants…
Le Pape, un homme comme les autres ? C'est l'une des conclusions du film, qui a le mérite de rester ouvert jusqu'à la fin, suspendue, éclairée d'espoir pour les uns, désespérée de la perte des illusions pour les autres.

 

 

Vos commentaires pour ce film

Oui, génial, et ce que tu en dis aussi. Je suis ravie que ce film t'ait plu. Comme moi, tu as été sensible à la beauté des images, les plans au ralenti de ces séances de volley dans la cour du Vatican, les corps de ces hommes tout d'un coup animés par un désir que le suspens de l'un d'entre eux ont réveillé, leurs envies de cappucino, de gagner une partie, de faire un puzzle ou d'en savoir plus sur les médicaments qu'ils avalent sans discernement. Une psychanalyse justement caricaturée mais tendrement, elle aussi, comme par un nouveau Tchekhov, avec qui j'ai découvert Piccoli autrefois, grâce à Jacqueline, aux Bouffes du Nord, dans La Cerisaie, géant ici (comme alors) dans son émerveillement enfantin et sa vocation théâtrale perdue (les répliques qu'il donne à l'acteur dans l'hôtel, reconnaissables entre toutes ! – un théâtre dans le cinéma, comme avec Shakespeare). Bref, un vrai bonheur, que j'aimerais goûter encore une fois.

Isabelle C, le 11 septembre 2011

 

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