La scène d’ouverture
est étonnante et révèle en très peu de
temps la personnalité du personnage principal : un homme doux
en apparence, peu porté sur la fantaisie, mais plein d’une
énergie frôlant la monstruosité. La suite est
moins originale et ne montre presque exclusivement que ce père
endeuillé et ses filles. Mais cette famille réduite,
confrontée à l’absence de la mère, est
filmée avec pudeur, sensibilité, respect. Ainsi, lors
de la révélation finale, lorsque enfin le père
parvient à annoncer à ses filles la terrible nouvelle,
il n’y a plus que des regards affolés, des pleurs silencieux
: ce qui est dit entre eux n’est pas audible, et pourtant, malgré
cette distance temporaire, l’émotion est énorme,
facile bien sûr, mais énorme. Les deux petites filles
sont tout à fait crédibles, spontanées, des enfants
rêvées sans être insupportablement sages, ou délurées,
ou charmantes. Elles sont juste des enfants comme il y en a des millions,
elles font énormément pour la réussite du film.
Le réalisateur n’a pas une ambition démesurée,
il ne cherche pas à asséner un discours supérieurement
intelligent sur la paternité, le deuil, l’absence…
Il essaye juste de suivre à un instant crucial, qui peut être
destructeur autant qu’initiateur, un père et ses deux
filles. Il y parvient, parce qu’il prend le temps de donner
une consistance à ses personnages, et qu’en retardant
la révélation aux enfants, il évite le pathos
qui aurait probablement englouti l’ensemble.
Et John Cusack ? C’est un petit miracle, beaucoup de complexité
sans en avoir l’air, visiblement c’est un rôle qu’il
a pris particulièrement à cœur, comme quelqu’un
dont on est éloigné, à qui il arrive une chose
terrible, et que l’on essaye de comprendre parce que malgré
la différence, la survie à la disparition d’un
être cher est universelle.