Ce sont deux puis trois personnages,
atteints de solitude aigue, qui se rencontrent, s’apprivoisent,
s’aiment ou se détestent, dans le décor presque
unique d’un vieux bar new-yorkais. Pas très réalistes,
gardant un telle part de mystère quant à leur passé
qu’ils en deviennent des sujets un peu théoriques, ils
parviennent tout de même à créer un ballet des
corps (par leurs corpulences contrastées, leurs démarches,
leurs postures), des sentiments (tout y passe, de la répulsion
à la dépendance en passant par l’amour et ses
surprises, l’amitié et ses petites trahisons), des voix
comme celles d’un trio indissociable.
Poétique, prenant son temps mais sans ennui, la mise en scène
sait rendre attachants ces trois âmes brisées dont on
ne saura jamais les antécédents et pour qui la vie peut
ressembler à une longue plainte. Au bout du compte, on les
quitte avec regrets. Les trois acteurs, qu’on n’aurait
jamais imaginés ensemble, se sont visiblement impliqués
dans l’entreprise et c’est un peu plus qu’un film
qu’il nous est donné de voir, avec une belle unité
de ton, de sens artistique, par l’accord des jeux, mais aussi
par les effets de lumière, l’ambiance sonore, les cadrages
.
Une jolie réussite d’un cinéaste islandais dont
le premier film "Noi albinoi", était très
original mais dans un esprit très différent.