J'aurais beaucoup aimé
être séduit par Frances, par sa douce folie, sa gaucherie,
ses déséquilibres, son sourire de guingois, sa quête
sans but… Frances est un vrai personnage, dont on comprend
qui elle est en quelques minutes… Une grande fille bancale
qui ne tient que par son amitié avec sa colocataire, sa "meilleure
amie" comme elle le dit à peu près trois cents
fois en moins d'une heure et demie… Le film raconte comment
elle tombe parce que cette amie se détache, sans jamais se
révolter, entre résignation, passivité et agitation
stérile. Le personnage devient peu à peu agaçant,
sans qu'il soit lui-même la cause de cet agacement. Il est
montré par petites touches répétitives, pas
une scène ne dure plus d'une minute… pour évoquer
un court séjour dans sa famille, cette succession de petites
séquences fait merveille, mais pour tenir tout au long d'un
film, c'est discutable. On aimerait que le récit se pose,
approfondisse certains aspects de cette vie chaotique. Tous ces
petits morceaux ont chacun leur charme mais ils ont tendance à
tous aller dans le même sens et rapidement, on a compris la
maladresse sociale de Frances, son côté "incasable",
sa peur des conventions, on aimerait voir plus loin… au contraire,
on s'enfonce dans un blues grisâtre (pas très aidé
par un noir et blanc très sombre, manquant de contrastes)
et inexorablement, malgré le montage rapide et les petites
trouvailles de mise en scène, l'ennui s'impose. La fin, plus
éclairée et forçant l'émotion, vient
relever l'ensemble, sans que l'on sache vraiment d'où vient
cet arrivage à bon port.
Oui, j'aurais vraiment aimé tomber devant cette fille, touchante,
lumineuse sans le savoir, mais voilà, ça ne l'a pas
fait…