Petit film croulant sous les bons
sentiments, sans invention, sans exubérance : oui, et alors
?
Qu’est-ce que ça fait du bien ! Sur à peu près
la même base que Monique, avec Dupontel, Craig Gillespie signe
un conte d’une grande douceur, où la folie délirante
d’un homme solitaire et renfermé transforme tous les
habitants d’un village en thérapeutes improvisés.
En acceptant une différence profondément dérangeante,
ils mettent de côté, au moins pour un temps, leurs a
priori. Il y a un côté très moraliste, renforcé
par le sermon final du curé, mais celui-ci passe très
bien, parce qu’il repose sur des réactions très
humaines, dont ne sont pas exclus les doutes et les ambiguïtés.
Trois femmes se relayent, sans toujours le savoir, pour donner naissance
à un nouvel homme, pour ouvrir les yeux d’un aveugle,
sans jamais forcer quoi que ce soit.
La jeune fille (Kelli Garner) est la moins ambiguë, mais son
charme vient de sa fraîcheur, de son innocence, de sa soif de
vie et de son refus de l’ennui, pas de sa beauté : elle
est bien loin d’être un top model, et cela la rend plus
réelle.
Le médecin (Patricia Clarkson) a un regard d’une humanité
bouleversante, on la voudrait tous pour confidente, pour accoucheuse
de vérités. Les séquences entre elle et Ryan
Gosling se déroulent sur un fil ténu, dont on a l’impression
qu’il pourrait rompre à tout instant, il y a énormément
de tension, et pourtant tout se règle par la douceur. Cependant,
la dernière image d’elle, couvant du regard son protégé
entre les mains d’une autre, la montre presque avec du regret,
la renvoyant à sa propre solitude. Il y a là énormément
de finesse et de pudeur, de sa part à elle, mais aussi de la
part du réalisateur, qui ne force pas le trait, se contentant
de suggérer, de laisser planer une possible mélancolie.
Et puis, il y a Emily Mortimer, qui joue la belle-sœur. On dirait
qu’elle ne joue pas, tant ses attentions semblent sincères.
Dans sa volonté de faire du bien, elle tombe parfois complètement
à côté, mais elle apporte une émotion indicible,
c’est un ange de bonté et sous sa fragilité apparente
et sa vie banale se cache une femme aimant les gens pour ce qu’ils
sont, sans craindre de choquer.
Ce n’est pas du cinéma spectaculaire, ce n’est
pas non plus une tranche de vie réaliste, personne ne peut
croire à une telle histoire, avec tant d’humanité
concentrée. C’est un conte sentimental, qui montre que
même sans drame on peut profondément émouvoir.
Emily Mortimer,
mais où l'a-t-on déjà vue ?