C’est un croisement pas si
improbable que ça entre Rohmer, Jacques Tati, et la comédie
de boulevard.
Les portes qui claquent, les amants dans le placard ou sur le balcon,
les méprises et autres quiproquos, Emmanuel Mouret décline
tous les poncifs du genre, allant même jusqu’à
installer ses interprètes dans des décors qui sonnent
volontairement faux, comme aux plus belles heures d’au théâtre
ce soir… Les cadrages souvent frontaux, les lumières
et les couleurs vives finissent d’ancrer le film dans cette
tradition ringarde, et tellement ringarde qu’elle en devient
presque moderne.
L’influence de Rohmer est aussi immédiatement palpable,
pas seulement dans les dialogues, très écrits, dits
de façon légèrement fausse, mais aussi dans les
situations, amenées comme des conséquences de raisonnements
intellectuels et non pas à la suite d’élans du
cœur. Le précédent film de Mouret, "un
baiser s’il vous plaît", était encore
plus marqué par les références à Rohmer,
avec des accents mélancoliques, jouant sur les souvenirs et
donnant un peu de gravité, ce qui n’est absolument pas
le cas ici. Même s’il y a quelques points d’acidité,
l’ensemble reste très léger, à la limite
du futile…
Et Jacques Tati, alors ? C’est très personnel. Je déteste
les films de Tati. Je le considère comme un mégalo jouant
tout seul, sans accepter quoi que ce soit de la part des autres, techniciens
ou interprètes… Emmanuel Mouret sait s’entourer,
au contraire de Tati, d’actrices un peu bizarres, un peu hors
normes, qui apportent à ses films énormément
de caractère. Mais comme Tati, il joue toujours le même
rôle, de la même façon, et il n’est pas drôle
(comme Tati, mais c’est mon opinion toute personnelle). Woody
Allen, dans un genre pas si éloigné que ça, a
l’intelligence de s’effacer de temps à autre, de
laisser la place. Mouret, non. En tant qu’acteur, il est omniprésent,
lourd, sans grâce, et il est bien difficile d’admettre
que toutes ces jolies personnes soient dingues de lui.
Mais peut-être est-ce là juste un effet de jalousie de
la part du spectateur masculin que je suis…