Elle s'en va *

Emmanuelle Bercot

L'histoire

Bettie, la soixantaine, se voit soudain abandonnée par son amant et en péril financier avec le restaurant familial. Que faire de sa vie ? Elle prend sa voiture, croyant faire le tour du pâté de maison. Ce sera une échappée.

Avec

Catherine Deneuve, Nemo Schiffman, Gérard Garouste, Camille, Claude Gensac

Sorti

le 18 septembre 2013


La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

L'échappée belle

 

Ça pourrait devenir une scène culte. Catherine Deneuve… Bettie, dans le film, mais là c'est plus Catherine Deneuve que Bettie, enfin on l'imagine comme ça, dans la vraie vie : une femme distinguée, encore belle, mais au naturel, très abordable avec tout de même un minimum de distance avant de connaître les gens, comme tout le monde ou presque, en somme. Bref, cette femme-là n'en peut plus de ne pas trouver une clope, juste une à griller, pour se faire du bien… Elle en demande une à un vieil homme qui prend le frais sur le pas de sa porte, comme on prend le frais quand on habite un village où pas grand monde ne passe. Le vieil homme est en train d'en finir une, et c'est sa dernière, lui dit-il. Elle est prête à repartir, mais lui la rappelle et la voilà, la scène : on les voit tous les deux dans la maison du vieux, assis de chaque côté de la table. Ce n'est pas un décor de cinéma, c'est une vraie table, de vraies chaises, et lui est en train de rouler une clope pour elle, avec ses mains qui ont perdu leur habilité, des grosses mains d'agriculteur. Elle, elle le regarde, mi fascinée parce qu'elle n'a jamais réussi à faire ça, s'en rouler une, mi impatiente parce que ça dure de longues minutes… La suite, les mots échangés, la confidence du vieux, son silence à elle, il faut le découvrir, laisser l'émotion vous prendre dans ses bras. Ce qui se passe là n'était peut-être pas exactement prévu comme cela par la réalisatrice, ni l'actrice (le vieux n'est pas un comédien professionnel, il est totalement brut de pomme, moi je lui donne le césar du meilleur second rôle tout de suite, même si ça ne dure que trois, quatre minutes), c'est peut-être une première prise, les silences durent et ont une intensité incroyable, c'est d'un calme absolu et ça tranche avec tout ce qui vient de se passer avant, la fuite, la voiture, le ras-le-bol de tout…
Catherine Deneuve en fait d'autres, des rencontres, tout le long de son périple, de son chemin vers elle ne sait quoi, peut-être une parcelle de liberté, peut-être un nouveau rocher pour s'y accrocher, comme une poule (pardon, comme une moule…;-)) Ah bien sûr, elle n'est pas bouleversante, elle n'est pas malade, elle ne s'écroule pas terrassée par le chagrin, elle ne fait juste que pleurer, parfois, doucement et nerveusement en même temps, elle regarde et elle écoute les autres, même si elle sait que ces autres-là ne font que passer dans sa vie, elle est terriblement touchante. Est-ce Bettie, son personnage, est-ce Catherine Deneuve ? Un peu des deux, sans doute.
Pour que le film ne s'enlise pas, pour que le voyage prenne un sens, on lui colle son petit fils dans les pattes, qu'elle connaît à peine. Le duo fait merveille, chacun dynamise l'autre et ce qui se passe entre les deux est suffisamment surprenant pour tenir en haleine.
Le film dans son ensemble serait magnifique s'il n'y avait cette dernière partie, un peu convenue, un peu facile, avec le vieux beau qu'on voit arriver énorme comme sa maison, avec ses très gros sabots de veuf grognon et fatigué mais prêt à redécoller… Dès lors, le naturel formidablement crédible de tout ce qui se passe avant en prend un coup. Tant pis, on fera comme si on avait oublié cette fin, pour ne retenir que le voyage de Bettie, qui vous réconcilie avec la vie, les désirs et ses imprévus. La belle échappée...

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