Ruby, rubis, comme un bijou,
comme la promesse de quelque chose de doux et piquant à la
fois… Partant d'une idée pas complètement nouvelle
(un personnage créé par un écrivain devient
réel) mais excluant de fait toute tentative de se prendre
au sérieux, le récit met beaucoup de temps à
démarrer. Il faut attendre un bon quart d'heure avant que
"Ruby" apparaisse, et tout ce qui se passe avant, présentant
le personnage de l'écrivain, paraît extrêmement
laborieux. Puis, lorsque la jeune femme en chair et en os, très
charmante, donne enfin de l'énergie à l'histoire,
celle-ci tourne un peu en rond, se mordant la queue. Puisqu'il a
créé son amoureuse, l'écrivain peut aussi la
modifier lorsqu'elle s'éloigne de lui, mais alors elle n'est
plus comme à l'origine et ne le charme plus, il lui redonne
donc de la liberté, ce qui la fait à nouveau s'écarter
de son créateur, qui pour s'en rapprocher lui fait faire
ce qu'il veut et la belle n'est donc plus si belle, et ainsi de
suite. Tout cela pour qu'au bout du compte, le scénario bascule
sur une pente un peu convenue, avec des jolies images d'un bonheur
possible, comme si la vie, après avoir été
torrent impétueux, se transformait en lac paisible.
Malgré tout, le film n'est pas désagréable,
c'est une fantaisie qui pose quelques questions sur le couple, pas
vraiment révolutionnaires mais qui ont le mérite de
donner un peu de corps à l'ensemble. La mise en scène
laisse beaucoup de place aux deux charmants interprètes,
Paul Dano et Zoé Kazan (enfin, surtout Zoé Kazan).
Parfois, de façon fugitive, on pense au splendide "Eternal
sunshine of the spotless mind" de Michel Gondry, mais c'est
juste en passant, peut-être à cause de l'amour qu'on
ne peut pas contrôler, ou de l'aspect légèrement
fantastique…
En guise de rubis, c'est plutôt du plastique de qualité,
brillant mais sans profondeur, plein de couleurs éclatantes
et s'oubliant assez vite.