Avec Murakami et Tchekhov comme
sources d'inspiration, le film ne promet pas qu'on se fende la poire,
ni qu'on s'extasie devant un suspense insoutenable. Amateurs de
poursuites en bagnole s'abstenir, il y a bien une voiture, rouge
de surcroît, mais c'est une vieille Saab, conduite le plus
doucement possible... Il faut aussi savoir qu'on part pour trois
heures de projection, le fauteuil a intérêt à
être confortable. Au bout du bout du bout de ces trois heures,
il y a de quoi être partagé entre l'impression que
de nombreuses scènes auraient pu être plus concises
ou carrément supprimées, et le constat que cette lenteur
est tout à fait nécessaire pour installer cette ambiance
très particulière, apaisante et hypnotique pour les
uns, mortellement ennuyeuse pour les autres. Les thèmes abordés
sont universels, le deuil, les remords et les regrets, la vie qui
continue malgré tout, l'amour et le désir, la mélancolie,
la culpabilité, l'acceptation et autres tourments de l'âme.
Il y a de très beaux moments, surtout grâce à
la femme muette (Tchekhov en langue des signes, c'est assez surprenant
et finalement plus prenant qu'en japonais...) et à la jeune
fille qui conduit, au visage étonnamment fermé et
pourtant plus expressif que les autres comédiens. Tout cela
est tout de même un peu froid, sans beaucoup de vie, d'une
douceur fabriquée, d'une bienveillance trop à la mode
et avec une retenue tellement calculée qu'elle n'emporte
guère. Mais c'est une œuvre singulière, tout
à fait respectable et qui plaira à beaucoup, et pas
seulement aux critiques.