Les deux personnages principaux
de ce faux petit film sont deux enfants, l’une pas encore adolescente
mais qui l’attend avec impatience, l’autre plus âgé,
pas encore adulte mais comme perdu dans une parenthèse entre
l’enfance et un âge où l’on perd son innocence.
Les hommes et les femmes, pères et mères, sans être
ignorés par la réalisatrice, sont en lisière,
et lorsque enfin ils interviennent, c’est avec leur pesanteur
d’adulte et c’est déjà trop tard, les deux
enfants ont tissé entre eux quelque chose d’indéfectible,
qui reste comme un secret, une intimité précieuse. Qu’importe
alors ce qui a réellement pu se jouer cet été-là,
le spectateur, comme les autres, est tenu à l’écart
de certains faits et cela donne au film un charme un peu mystérieux,
d’une délicatesse extrême malgré la lourdeur
de ce qui est révélé.
Le début fait croire à une chronique intimiste, pour
la jeune fille un été à se rendre compte qu’elle
quitte doucement son état d’enfant. Les dialogues sont
rares, beaucoup de choses se jouent dans les regards, l’attente,
l’indolence. Rarement au cinéma on n’a autant senti
cette impression que donne l’été, faite de moments
à ne rien faire, à cause de la chaleur, de l’ennui,
de la douce torpeur qui envahit le corps et l’esprit. La petite
fille, au contact de sa sœur aînée déjà
très adolescente, ressent quelque chose qui s’éveille
en elle… on peut se dire alors qu’on a déjà
vu tout cela et même si tout est beau, sensible, d’un
charme fragile tout à fait séduisant, il n’y a
rien d’innovant.
Et puis, peu à peu, le récit prend une autre tournure,
plus grave, et sans se départir de son caractère intimiste,
il surprend, ne va pas où on l’attendait. Il y a bien
sûr une révélation psychologiquement dramatique
à l’origine de cette évolution mais ce coup de
théâtre n’est absolument pas montré comme
tel, comme le reste de l’histoire on ne le devine que par petites
touches. C’est magnifiquement délicat, il y a une grande
tendresse pour les personnages, quels qu’ils soient. Les deux
visages des enfants, celui de Mario en particulier, restent gravés
longtemps après la fin de la projection. Définitivement,
c’est comme un grand film qui se cache sous des apparences modestes.
En guise de confirmation, au hasard du générique, on
découvre comme une évidence "El Deseo", qui
produit les films d’Almodovar…