C'est l'histoire d'une reconstruction,
celle d'une jeune fille ayant vécu sous l'emprise de son
père pédophile. Le récit est attendu, hyper
balisé, l'évolution de la jeune fille comme tous les
personnages secondaires ne réservent que peu de surprises.
Mais il y a là, dans l'interprétation, dans la très
haute tenue de la mise en scène, dans l'absence de pathos
ou de recherche d'émotions faciles, quelque chose qui tire
le film vers le haut. C'est digne malgré l'effarante posture
de la jeune fille lorsqu'elle est accueillie dans le centre d'urgence.
A aucun moment il n'y a d'ambiguïté dans le propos de
la réalisatrice. Elle accompagne Dalva avec douceur même
lorsqu'elle celle-ci est en pleine révolte (Zelda Samson,
la jeune actrice, est bluffante), le père-prédateur
ne l'intéresse pas, tout est centré sur le cheminement
psychologique et physique de la victime, comment parvient-elle à
retrouver une liberté de penser, de se comporter, d'exister.
Ceux qui l'entourent le font avec leurs maladresses, certes, mais
tous ont la conviction qu'il ne peut en être autrement. La
question centrale qui se pose n'est pas sur le caractère
inacceptable de la relation entre le père et sa fille (rien
n'est montré, et c'est tant mieux, tout est suggéré
avec beaucoup de délicatesse), mais bien sur la façon
de s'en extraire, de retrouver la lumière. Il y a bien sûr
un aspect normatif, on pourrait se dire que la reconstruction brise
la singularité, mais lorsque cette dernière repose
sur un interdit ultime, sur un crime, il n'y a pas de choix possible.