Vos commentaires
pour ce film
Documentaire passionnant.
Mathias Théry et Etienne Chaillou filment Bastien, un jeune militant
du front national. En deux temps. D’abord en situation, avant et
pendant la campagne présidentielle. Puis, quelques mois plus tard,
tandis qu’il lit, commente et complète le « scénario
» issu de la première séquence.
C’est très subtil. Même s’il semble clair que
les réalisateurs ne partagent pas les thèses du FN, loin
s’en faut, le film n’est pas une dénonciation brutale.
Il décortique, avec respect et même une forme d’empathie,
le parcours de Bastien. Il ne juge pas mais donne de la « matière
à penser ». Il s’attarde sur la zone instable entre
brutalité et volonté de dédiabolisation, entre pulsions
de haine et codes de bienséance. Cette zone qui traverse la vie
intime de Bastien mais aussi le parti en tant que tel.
En parallèle au parcours de vie de Bastien, le film montre aussi
le cynisme de ceux qui veulent faire carrière en politique (et
sur ce point-là, le FN n’a certainement pas l’exclusivité),
la médiocrité des calculs politiciens. Tout cela prospérant
sur une misère sociale et culturelle qui n’est pas vraiment
décrite dans le film mais qui apparaît néanmoins,
comme un décor de théâtre.
Ce parcours de vie est haletant et éclairant. Je ne sais pas ce
qu’il deviendra, mais Bastien est courageux d’avoir accepté
ce portrait. Est-il un connard ? Il se pose lui-même la question
et c’est assez fort.
Thierry D. le 11 février 2020
Est-ce qu’un homme qui se demande s’il
est un connard est un connard ?
Une personnalité se révèle sous la caméra.
La confiance installée entre les filmeurs et le filmé permet
cela. Ce garçon est touchant parce qu’il est sincère.
Dans ses idées, ses choix, ses questionnements et ses doutes. Il
ne fait jamais semblant. On assiste à une libération. La
libération d’une parole, d’actes reniés, d’un
passé difficile. La libération comme une analyse. Ce garçon
qui ne paraît pas agressif est violent, c’est son histoire,
mais il a soif de réparation.
Qu’est-ce qui a merdé ?
Les adultes. La famille. Les profs. L’école. Les attentes
impossibles, le décalage. Et le bonhomme a dérapé.
Le malaise. L’incompréhension. La colère. La violence.
L’envie de tuer. On a échappé au drame. De peu. Et
le salut n’est pas venu du meilleur… Il pourrait être
caricatural, un cliché, un mec aux cheveux très courts,
à l’occasion bagarreur et qui aime les jeux avec des armes.
Pourtant il cherche à comprendre, est déçu par l’appareil
du parti et les aspirations individuelles. Il dit qu’au fond il
pense être quelqu’un de bien. Sans doute. Il n’a pas
connu le côté scandaleusement raciste, provocateur et méprisant
du FN. Mais c’est de là que le parti pour lequel il milite
vient, il occulte cette partie de l’histoire, comme le lui rappelle
le journaliste.
Son envie d’engagement est si forte qu’il finit par assumer
son passé et il ne sait pas ce que cela aura comme conséquences
sur son avenir au sein de ce parti politique. Mais il préfère
dire que se taire, assumer que vivre avec cette part d’ombre, s’engager
que de rester sur le côté.
J’ai eu envie qu’il s’en sorte, qu’il en sorte,
que cette parole lui permette de comprendre et de passer à autre
chose. Fatalement. Parce qu’il vaut mieux que « ça
». Je veux avoir confiance dans la bonne nature humaine. Il ne faudrait
pas grand-chose. Mais rien n’est jamais sûr. Je peux me tromper.
KDB, le 16 février 2020
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