C'est un polar sans flics, au
récit d'abord tortueux qui perd le spectateur pour son plaisir,
puis s'épure, s'attachant à un trio de personnages
pour en épouser leurs points de vue respectifs. L'histoire
va chercher quelques détours, joue avec les fausses pistes
en les rendant glissantes pour certains. Il y a des lenteurs calculées,
des raccourcis saisissants, des beaux contrastes, des surprises
qui résident plus dans la mise en scène que dans le
récit. L'esprit qui plane sur l'ensemble du film est celui
du western, malgré son ancrage contemporain. C'est sec, parfois
aride, c'est une vengeance classique au fond, mais plutôt
surprenante dans son accomplissement, parce que le vengeur n'est
pas, dans un premier temps, celui que l'on croit, parce qu'il est
mû par une obsession et que celle-ci le fait tenir debout,
malgré ses vacillements, ses pertes d'équilibre, ses
décisions irraisonnées. Un polar tendance western
donc, sans méchant désigné et sans un héros
pur et irréprochable. Les durs à cuire ont des fragilités
et les calmes ne le sont qu'en apparence, la fille est belle sans
en avoir l'air, la violence éclate maladroitement et du coup
elle n'en est que plus féroce, l'image a du grain, elle est
un peu sale, la caméra tremble… et tout cela donne
à ce petit polar un sacré caractère.