Le film choral à la française
devient un genre à part, sorte de fourre-tout sociologique
et sentimental, avec parfois de très belles intentions mais
souvent un manque d’ambitions dans la réalisation. Ce
code ayant changé est dans la droite ligne du genre : une situation
plutôt intéressante, avec un dîner central réunissant
tous les personnages ou presque, et qui représente une sorte
de tournant dans le destin particulier de chacun. Le soin apporté
à la présentation des protagonistes fait plaisir à
voir, sans recherche systématique de la réplique qui
fait mouche, mais avec parfois beaucoup de finesse, on évite
les clichés pour la plupart d’entre eux. La grande majorité
des séquences intimistes, mettant en lumière deux ou
trois personnages à chaque fois, sont plutôt réussies.
Mais la grande scène du dîner est étrangement
ratée : cafouillages, erreurs techniques (raccords, perches,
post-synchro), errance de la caméra : on ne comprend pas tous
les dialogues, et lorsqu’on les entend, ils sont démonstratifs,
joués assez faux, bruyants et vides en même temps. On
songe alors avec nostalgie aux scènes millimétrées
et qui paraissaient improvisées au cours du repas dominical
de "la graine et le mulet"…
Du coup, l’ensemble paraît très déséquilibré,
comme s’il n’avait pas été réalisé
par la même personne : une observatrice mesurée et plutôt
juste pour une partie du film, une expéditrice à gros
sabots pour le reste.
Si l’ont veut évoquer l’interprétation,
il y a aussi un déséquilibre, les femmes plus crédibles
que les hommes, plus émouvantes, plus tranchantes, plus ambiguës
aussi. Il faut dire que du côté des hommes, il y a deux
calamités, Patrick Bruel et son regard douloureux à
mourir… de rire tant il paraît fabriqué, et Christopher
Thompson dont la mère (la réalisatrice) devrait comprendre
pourquoi il ne tourne qu’avec elle (ou presque).