Léa Mysius, en deux films,
impose un style, une patte singulière. Ces Cinq Diables,
c'est le nom du lieu où a été tourné
le film, mais c'est aussi, peut être, lié aux personnages
de ce récit étonnant, en trompe l'œil. Crise
familiale, amours scandaleuses, fantômes, sauts dans le passé...
ou rien de tout cela, juste la chronique d'une enfance singulière,
celle d'une petite fille littéralement amoureuse de sa mère,
dotée d'un odorat surnaturel et persécutée
par ses camarades de classe.... ou bien encore, si on pousse tous
les curseurs de la narration au maximum, une énigme psychanalytique
autour du désir (désir d'enfant, désir de possession,
désir de liberté...).
Pour mettre tout cela en images, en mots et en situations, Léa
Mysius utilise un langage cinématographique en apparence
classique mais parsemé de fulgurances, avec un travail formidable
sur le son et l'emploi de la musique. C'est un cinéma féministe
dans le sens où les personnages décisionnaires sont
des femmes, c'est aussi un cinéma de l'enfance sans aucune
mièvrerie, cru, à la fois naturaliste et onirique.
On pourra lui reprocher parfois un aspect un peu démonstratif
ou redondant dans l'exposé des faits. Mais ce n'est que broutilles
au regard du talent évident mis ici au service d'une œuvre
riche, dense, enthousiasmante.