Le ciel attendra *

Marie-Castille Mention-Schaar

L'histoire

Sonia, 17 ans, a failli commettre l'irréparable pour "garantir" à sa famille une place au paradis. Mélanie, 16 ans, vit avec sa mère, aime l'école et ses copines, joue du violoncelle et veut changer le monde. Elle tombe amoureuse d'un "prince" sur internet. Elles pourraient s'appeler Anaïs, Manon, Leila ou Clara, et comme elles, croiser un jour la route de l'embrigadement…

Avec

Noémie Merlant, Naomi Amarger, Sandrine Bonnaire, Clotilde Courau, Zinedine Soualem

Sorti

le 5 octobre 2016


La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

Et en plus, c'est du cinéma !

 

Le sujet est lourd, d'une actualité terrible (l'embrigadement de jeunes femmes par des islamistes), traité, semble-t-il, avec beaucoup de réalisme, jusqu'à y faire figurer dans son propre rôle l'animatrice d'une association œuvrant à la fois contre cet embrigadement et pour aider les jeunes qui ont pu s'en échapper à retrouver une vie "normale". Le récit de la plongée dans un trou sans fond vers l'horreur d'une jeune fille cultivée, éprise de musique, ayant un cercle d'amis, équilibrée en apparence, est édifiant. Il suffit d'un événement certes déstabilisant (le décès d'un proche) mais finalement assez banal pour que la jeune fille se retrouve peu à peu sans repères, complètement poreuse à toutes sortes d'aberrations. On comprend comment, de l'autre côté d'un écran, avec pour seule arme l'échange par internet, un réseau de recruteurs parvient à repérer des faiblesses, passagères ou profondes, qui leur permettent de semer des doutes, des interrogations existentielles qui n'ont qu'une seule réponse, une rupture radicale avec une société gangrénée qui débouche sur un engagement total dans une croisade effroyable.
Le film a la très grande intelligence de montrer deux parcours en parallèle, celui de cette jeune lycéenne qui perd pied d'une part, et d'autre part celui d'une autre fille, ayant sensiblement le même profil, mais qui au dernier moment et contre sa volonté n'a pas pu rejoindre les islamistes, et qui est montrée dans un processus de "désembrigadement", exactement comme une désintoxication.
Dit comme cela, le sujet a tout pour faire fuir, mais le film est un vrai objet de cinéma, par son double récit, qui se fait triple, montrant aussi le désarroi d'une mère. La construction du scénario et le montage, complexes, renvoient sans cesse le spectateur d'un parcours à l'autre, passant du désespoir à l'effroi, de l'émotion brute à la réflexion pointue sur ce qui pousse ces jeunes sur ces chemins sans issues, d'une mince raison d'espérer à la lumière, enfin, une renaissance possible…
Le modernisme de la forme, l'énergie qui s'en dégage, l'aspect complètement cinématographique de l'ensemble, tout devrait concourir à séduire un public jeune et le premier concerné. Un immense bravo à la réalisatrice, visiblement impliquée dans son sujet de façon profonde, qui livre une œuvre puissante, grave, marquante, sans oublier de faire du cinéma qui mêle lumière et noirceur.

 

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