Les films d'Emmanuel Mouret vont-ils
remplacer ceux de Rohmer ? Comme pour le vieux maître disparu,
à chaque nouvelle sortie, on se tâte, on hésite,
et puis on finit par craquer, parce qu'il y a des jolies actrices,
parce que le scénario a l'air plutôt malin, parce que
le récit, on le sait d'avance, va aborder des choses un peu
graves avec légèreté, qu'il y fait souvent
beau temps, qu'on en ressort toujours un peu agacé mais avec
une très, très douce mélancolie parce que finalement,
ces personnages en déséquilibre, c'est un peu nous
tous. Mal joué (mais de façon presque charmante),
filmé sans aucun effet, et toujours (ou presque) avec Emmanuel
Mouret qui interprète le même personnage de film en
film, un grand escogriffe timide un peu lâche, mais devant
qui les filles se pâment. Aussi réaliste que des promesses
électorales. Et en même temps, par certains aspects,
on pourrait presque y croire.
Ce caprice ne brille pas par sa crédibilité, c'est
sûr. Vous en connaissez beaucoup, vous, des maîtres
d'école dont la compagne est une actrice très connue
? Un peu comme si, au hasard, j'étais marié avec Juliette
Binoche, ou Cate Blanchett… Oui, je vois votre sourire condescendant
et moqueur… Bref, passons.
Mais au diable le réalisme, c'est du cinéma, après
tout, et écoutons l'histoire. Elle n'est pas si stupide que
ça, elle réserve quelques moments vraiment drôles
et se teinte en fin de parcours d'un peu de gravité. Oh,
pas grand-chose, juste quelques petits passages où les sentiments
des uns et des autres peuvent toucher. Et puis les acteurs jouent
un peu moins faux que d'habitude.
Peut-être aussi est-ce comme un rituel, on va voir un film
d'Emmanuel Mouret, on sait ce qu'on y attend, on n'est pas déçu,
pas surpris, pas bouleversé, mais on passe un moment agréable.
C'est déjà ça.