Jane Campion sait y faire, pour
raconter une histoire d’amour fou. La relation enflammée
entre le poète John Keats et une jeune femme issue d’une
famille aisée est-elle historiquement tout à fait juste,
sans doute, ou pas, et d’ailleurs on s’en moque. La vérité
n’est pas ici le but recherché par la réalisatrice.
Il est probable que, comme tous les films d’amour (et celui-ci
en est un archétype), l’état sentimental du spectateur
jouera sur l’impression globale engendrée par le récit
de cette passion partagée, ces jours, ces heures où
tout s’éclaire, puis s’assombrit, puis s’illumine
encore, jusqu’à l’aveuglement… Les sons,
les décors, les costumes, les images, tout est beau et même
très beau, c’en est à pleurer, tant de beauté.
Certaines scènes sont de vrais bonheurs, comme celle où
le couple suit la petite fille, s’arrêtant comme des statues
lorsqu’elle se retourne, les images créent alors une
poésie à la hauteur des mots de Keats. A d’autres
moments, les deux amoureux se récitent des poèmes et
malgré l’intensité de leurs regards, on a tendance
à chercher du sens à tout cela et à trouver le
temps un peu long…
Ce "Bright star" qui devrait briller au moins autant que
"La leçon de piano", déçoit légèrement,
peut être parce que le poète, objet potentiel de fascination
et d’admiration, manque d’épaisseur, respectant
finalement un peu trop les clichés habituels sur les artistes
tourmentés, au contraire de la jeune fille, au visage d’une
beauté surprenante, pas immédiatement évidente.
Elle apporte un charme étrange, un peu décalé,
assez loin de l’héroïne romantique classique. C’est
pour elle et la beauté formelle du film qu’on oubliera
les quelques longueurs…