C’est du cinéma
radical, tranchant, explosif, furieux. L’histoire s’apparente
à un conte sans fées mais sanglant, un western d’anticipation,
une allégorie d’un monde partagé en deux, ceux
qui possèdent les richesses, décident et ont le droit
de jouer d’une part, et ceux qui n’ont bientôt
plus rien, vivent de subsides et sont réduits à l’état
d’objets d’autre part. Bien sûr, c’est exagéré
et caricatural, tout à fait improbable (quoique, le pire
évoqué ici n’est pas si éloigné
que ça de certaines réalités), mais le scénario
met en scène une possibilité de résistance,
une folie froide, furieuse et salvatrice en réponse à
la barbarie. Comme tout cela est filmé avec emphase, alliant
le trivial et le spectaculaire, le suspense et l’humour noir,
Bacurau devient peu à peu un objet de plaisir légèrement
régressif et politiquement incorrect, un coup de pied dans
la mare de la bienséance, un doigt d’honneur à
la diplomatie, une énorme baffe à la modération.
Cependant, l’ensemble ne se réduit pas à un
film de guérilla, loin de là. Il montre une communauté
hors du temps drôlement attachante et singulière, pas
idyllique, pas un modèle de vertu, juste des gens qui survivent
ensemble, naissent et meurent. Au passage, ils n’aiment pas
qu’on les emmerde. Et c’est tant mieux.
