C’est l’histoire d’un
affrontement, d’une fascination, d’une alliance contre
nature. Le duo-duel entre Bacri et Rottiers semble être d’abord
le reflet d’un conflit de classes sociales, avec d’un
côté une famille bourgeoise dont le père, malgré
la réussite financière, vit son existence comme une
déception, face à un jeune homme qui malgré la
prison passée, son statut inférieur, son manque de culture
et d’éducation, apparaît comme beaucoup plus libre.
Le drame qui les unit sans qu’ils le veuillent, les fait dépasser
tous les deux cette opposition trop simple : il y a alors quelque
chose qui ressemble à une relation filiale, mais pas seulement.
L’un protège l’autre en ne le dénonçant
pas, la nouvelle relation qui en découle pourrait être
caricaturale, le bourgeois et le maître-chanteur, mais c’est
beaucoup plus complexe que cela. Il y a une réelle estime,
et leur façon à tous les deux de défendre l’autre
au sein de leur propre réseau social montre qu’il ne
s’agit pas seulement d’y chercher un intérêt
matériel. L’ambiguïté est maintenue une bonne
partie du film, et plus d’une fois on se croit dans une intrigue
à la Chabrol, tout en mouvance et en faux-semblants. La dernière
partie, avec l’arrivée d’une inspectrice de police
(Sylvie Testud, roublarde et faussement joviale comme l’inspecteur
Lavardin), fait se lézarder cet équilibre précaire.
Le film prend une direction à la fois plus légère
(on est dans l’enquête proprement dite, et le côté
ludique ressurgit) et plus dramatiquement convenue (les positions
de chacun se radicalisent). Il n’empêche, l’ensemble
est une réussite, ressemblant à un très bon Chabrol.