Ah, c'que c'était bien,
"les triplettes de Belleville"… Sombre, drôle
et poétique, un univers complètement inédit,
une animation fourmillante…
Sylvain Chomet a abandonné ses crayons pour tourner avec
de vrais acteurs dans des décors réels (en studio
quand même). Et la magie créatrice s'est figée.
Il y a un côté Amélie Poulain dans cette ambiance
surannée et trop colorée pour être vraie. Mais
là où Amélie donnait du bonheur parce qu'elle
était charmante et pleine de vie (même artificielle),
Paul le neveu pianiste muet n'est absolument pas drôle, et
n'a aucun charisme. Les deux tantes, pourtant jouées par
des comédiennes formidables, exaspèrent par leur aspect
monobloc et n'évoluent pas d'un millimètre d'un bout
à l'autre du film. Et Madame Proust, celle qui fait des psychanalyses
accélérées à grand renfort de tisane
au LSD, devait être interprétée par Yolande
Moreau. Elle a finalement été remplacée par
Anne Le Ny, qui est vraiment très bien, mais n'a clairement
pas l'étincelle de folie douce nécessaire pour le
rôle.
Tous ces personnages évoluent dans un univers étriqué,
où l'humour paraît forcé, avec des gags répétitifs
un peu pénibles. On ne croit pas vraiment (pas du tout, même)
à ce cours de danse, à ces relations familiales, à
ces souvenirs en couleurs, à l'amoureuse chinoise faussement
délurée. Tout est trop construit, presque trop maîtrisé,
les surprises sont sagement amenées, l'ennui n'est pas loin…
Et l'histoire, à coups de souvenirs enfouis, comme une enquête
mentale, on l'a déjà vue, lue, revue, entendue cinquante
mille fois et à la fin on se dit, ah, ce n'était que
ça ?
Allez, Monsieur Chomet, redonnez-nous du plaisir, retrouvez votre
folie, peut-être en repassant par l'animation ?