Une vraie radicalité traverse
tout le film. Des choix techniques et de mise en scène imposent
au spectateur un univers qui peut rebuter, créer une distance
et empêcher l'adhésion…
Il s'agit d'animation, avec des figurines créées à
la main ou en impression 3D, et filmée en stop-motion (plus
de 100 000 photos prises une à une…). Cela crée
une impression de réalité assez troublante, parfois.
Mais les réalisateurs ont choisi de garder les "coutures"
des visages, si bien que jamais l'illusion ne fonctionne vraiment.
Au contraire, cela renforce l'idée que tout ceci est une
prouesse technique au service d'une histoire où le mal être
englue ses personnages. La métaphore (?) des coutures, des
cicatrices, est bien lourde…
Les voix des personnages… ne sont que trois ! Deux pour les
personnages principaux (une voix masculine et une autre féminine)
et tous les autres protagonistes, homme ou femme, sont "joués"
par une seule troisième voix masculine. Cela crée
parfois quelques confusions, et surtout ce procédé
empêche de croire aux personnages. Lorsque la voix féminine
se fait entendre, on comprend le choix de Kaufman, qui veut que
la séduction vienne de là, de ce son différent.
D'ailleurs, le personnage masculin le dit, il aime cette voix…
D'autres partis-pris émaillent le récit, comme la
volonté de montrer la scène d'amour en dehors de tous
les clichés romantiques. C'est une scène de sexe,
avec les maladresses de deux corps qui s'unissent pour la première
fois.
Tout cela constitue un drôle d'objet filmique, pas inintéressant
mais trop étrange pour se laisser emporter par l'histoire,
par le propos sur la monotonie de l'existence, seulement déchirée
par les rencontres. Désolé, cette rencontre-là,
avec ce film, ne s'est pas faite.