Les amours imaginaires ***

Xavier Dolan

L'histoire

Francis et Marie, deux amis, tombent amoureux de la même personne. Leur trio va rapidement se transformer et chacun va tenter d'interpréter à sa manière les mots et gestes de celui qu'il aime...

Avec

Monia Chokri, Niels Schneider, Xavier Dolan

Sorti

le 29 septembre 2010

La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

L’Amour du cinéma

 

 

 

 

 


LE plaisir… on accepterait de subir cinq palmes d’or aussi pénibles que l’oncle de l’abeille qui fait boum, ou bien dix machins américains en 3D, juste pour le bonheur de découvrir un tel bijou, en forme d’avalanche d’idées, drôle, surprenant, exaltant, excitant, désespérant aussi mais d’une mélancolie joyeuse…
Ces amours imaginaires explosent de couleurs, d’angles impossibles, de lumières étincelantes ou crépusculaires ; on se croirait parfois dans une œuvre concoctée par l’imagination conjointe de Tarantino, Wong Kar-Waï et Almodovar, et puis non, même s’il y a des influences, indéniables, l’auteur (oui, Xavier Dolan est un auteur, à part entière) a sa propre personnalité, provocante, extravertie, spectaculaire.
Ce qui frappe à la vision de ce film américain (oui, mais du nord, et plus précisément québécois, avec des intonations à mourir…), c’est son style, comme dirait Ferré. Xavier Dolan ne fait pas du cinéma calibré, il faut que ça en mette plein la vue, et la vue ainsi remplie, on a l’esprit ouvert, et en fin de compte, ravi. Avec une idée à la minute, chaque scène regorge d’inventivité : ici un cadrage hallucinant, plus loin une transition musicale extra-osée, ailleurs un déhanchement de rêve, et puis un gros plan sur un visage extatique, une silhouette comme illuminée de l’intérieur, des corps enlacés dansant et pourtant immobiles, on pourrait prendre chaque plan comme une perle, et tous réunis, en faire un collier somptueux, où rien ne ressemblerait à la suite ni à ce qui précède.
Alors oui, parfois, on se perd dans une telle débauche d’images, on se croirait dans une publicité pour parfum, on frôle le narcissisme (regardez comme c’est beau ce que je filme…) et forcément, avec les suites pour violoncelle de Bach, toute image devient belle… il n’empêche, la forme est d’une séduction absolue et l’ambition énorme du metteur en scène pour son film n’atteint jamais la prétention car cette beauté n’est pas gratuite, il y a un discours là-dessous. Bien sûr, ce qui est dit sur l’amour n’est pas fondamentalement original mais les clichés sont absents, et l’ensemble du récit parvient à ne pas être complètement noir, ni béatement rose, tout en évitant le gris ambiant de tant d’histoires d’amour du cinéma contemporain. Comme le titre l’indique, on ne sait pas ce qui est imaginaire ou réel et cela n’a aucune importance, les contrastes parviennent à donner de la valeur à toutes les teintes, à toutes les scènes, aux trois personnages, à leur non-dits comme à leurs tirades hilarantes ou mélancoliques. Des trois comédiens, Monia Chokri brille peut-être plus que les autres (mais je suis un homme, hétéro à 300 %), elle porte ses robes, ses moues et son humour d’une façon inimaginable… sauf peut-être par ce diable de réalisateur, dont l'imagination déborde, envahit tout l'écran!
Les amours imaginaires, encore, encore, encore…

Oups ! j'en dis trop ! allez le voir en imaginant qu'on vous a dit que c'était une bouse ou une chose insignifiante...

 

 

 

 

 

 

Vos commentaires pour ce film

"les amours imaginaires"
si imaginaires = que l'on s'imagine payés de retour oui il s'agit bien ici d'amours imaginaires ...
Pourtant que de réalisme dans ce film , il mêle l'histoire de deux amis qui tombent passionnément amoureux du même garçon à des témoignages criants de vérité de jeunes hommes et jeunes femmes qui vivent un amour impossible ou sont en train de vivre une rupture, il y a presque un côté docu-psy dans ces tranches de vie qui nous sont confiés par ces jeunes tout à fait conscients de ce qu'ils vivent ou subissent. Un plan noir(je ne suis pas sûre que ce soit le bon terme) permet au spectateur de passer de l'histoire d'amour aux témoignages des jeunes. Je pense que chaque spectateur peut s'identifier à l'un d'entre eux même si je ne crois pas que le but recherché soit de cataloguer ou inventorier des situations amoureuses, une jeune femme à lunettes un peu disgracieuses (les lunettes !) oh combien touchante tellement elle semble lucide sur sa névrose, nous fait partager son obsession pour un mec qui ne sait sans doute même pas qu'elle existe, des garçons et filles n'hésitent pas à confier leur désarroi après une rupture ou un RV. Cela pourrait sembler artificiel d'avoir intercalé ces témoignages qui montrent des personnes ne semblant avoir aucun rapport avec l'histoire d'amour conductrice mais non, ces pauses créent plutôt un climat ou une sorte de contexte.
quant à l'histoire d'amour....imaginaire mais ô combien réaliste, elle met en scène un garçon et sa meilleure amie tombant tous deux en amour pour le même jeune homme mais pas vraiment Jules et Jim; elle montre de quelle manière chacun et chacune va se fabriquer sa relation amoureuse à sens unique, chacun et chacune va interpréter sa propre partition en essayant d'évincer l'autre qui est pourtant un(e) ami(e) tout ça pour un beau gosse assez charismatique qui n'a que faire de l'un et l'autre et a juste une conception de l'amitié un peu trop rapprochée et un côté manipulateur, trop coolissime pour être honnête...
La jeune femme qui essaie maladroitement de se faire la plus belle pour chacune de leurs rencontres, qui emploie tous les moyens même déloyaux envers son meilleur ami pour l'attirer dans ses filets, gagne en humanité au fur et à mesure qu'elle perd l'espoir et que son attitude physique devient plus raide, compassée. Le jeune homme lui se perd petit à petit dans des relations sexuelles avec des substituts de son amoureux imaginaire.
Les deux scènes où chacun et chacune va oser faire sa déclaration sont indicibles, ils ne jouent pas, ils ne sont qu'espoir, angoisse et souffrance, et l'autre les repousse chacun leur tour avec une formulation différente mais dans les 2 cas dégageant une indifférence et un mépris qui les anéantit. Ceux qui ont vécu ça s'y retrouveront, ce n'est plus du réalisme mais la vie pour de vrai !
Après plusieurs mois d'absence, l'amoureux imaginaire revient et arrive dans une soirée où les deux amis sont ensemble, ils le voient qui vient vers eux avec son air comme si de rien n'était arrivé, le jeune homo pousse un cri incroyable, déchirant, pour ne pas entendre ce que va dire leur "bourreau des coeurs" et lui signifier qu'il ne veut pas qu'il s'approchent d'eux, on sent à cet instant quelle souffrance il endure encore rien qu'en le voyant ! Le regard de la fille est tout aussi expressif, la souffrance est encore là mélangée à la haine sous un masque d'indifférence hautaine.
La scène finale quelques instants plus tard peut peut-être s'interpréter comme le signe que la vie va reprendre son cours mais moi j'ai plutôt eu l'impression qu'ils allaient replonger dans la même merde avec un substitut très ressemblant de leur "bourreau des coeurs".
Amoureux malheureux s'abstenir ! à moins que les délices de la souffrance de l'amour non partagé vous attirent, une forme de voyeurisme qui nous fait du bien et du mal en même temps! dans ce cas-là courez-y vous vivrez un grand moment de cinéma réaliste...


Sophie L.

 

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