C'est très américain,
Philip Roth, non ? Quelque chose de puissant mais un peu ennuyeux,
un peu vulgaire, se regardant le nombril sans verser dans l'intimisme,
lourd et complexe à la fois… ça ne me l'a jamais
fait. Jamais été au bout d'un de ses bouquins, ou
alors j'ai oublié.
Dans cette pastorale américaine, adaptation, donc, vous l'aurez
compris, d'un roman de l'écrivain américain, il y
a tout cela, la lourdeur, la complexité, un refus de toute
approche psychologique, un peu d'histoire (les années 60,
les révoltes contre la ségrégation, les poseurs
de bombes…), un regard amer sur la vie américaine idéale.
Ewan McGregor aborde le monument avec aplomb, mais sans finesse.
Le récit est clair, presque trop, l'image élégante,
le mouvement de caméra mesuré, le cadrage classique,
la musique mélancolique et pas trop envahissante, le maquillage
qui vieillit absolument parfait… Sur la forme, il n'y a pas
grand-chose à redire, on dirait presque du Clint Eastwood.
Du solide. Mais il y a comme un manque. Un manque de souffle, d'emphase,
de romanesque… et cela autant du point de vue de la mise en
scène que de celui de l'interprétation. Dakota Fanning
bégaye comme il faut (c'est le personnage), et passe de la
rébellion à l'invisibilité en évitant
(presque) d'agacer le spectateur. Jennifer Connelly joue la grande
dame qui la joue toute simple puis sombre dans la folie, c'est impeccable
mais cela n'engendre aucune émotion. Ewan McGregor semble
toujours un peu en dessous de ce qu'il voudrait montrer, que ce
soit la force tranquille, l'assurance de soi, la colère,
la douleur, l'incompréhension, l'ambiguïté…
Il faut attendre la toute dernière minute, avec un plan enfin
audacieux, une silhouette suivie de derrière, pour que quelques
frissons viennent suinter de l'écran.