Vrai-faux film historique, avec
des personnages ayant réellement existé, observés
et parfois troublés par Sidonie Laborde, fruit de l'imagination
(sauf son nom et sa fonction) de la romancière Chantal Thomas,
fictionnelle donc, mais pas tout à fait. Elle représente,
avec ses congénères, les servantes de la famille royale,
petites, toutes petites au regard de la noblesse, mais parfois d'une
très grande intimité avec ceux qui ont le pouvoir.
Lorsque l'on se trouve devant un tel objet cinématographique,
il est difficile de ne pas le comparer avec ce que l'on croit être
la réalité historique, celle qui nous a été
façonnée par l'école, les livres, les images
d'Epinal ou d'ailleurs… Ce que l'on voit à l'écran
surprend. Le faste attendu est bien là mais il y a une proximité
étonnante, une façon de filmer qui fait pénétrer
le spectateur dans l'intimité des alcôves et des boudoirs,
avec l'impression d'y être, sans recul, sans artifices. Ce
qui est dit des quatre premiers jours de la Révolution Française,
côté cour royale, n'a un intérêt que pour
l'atmosphère ressentie, une micro-société complètement
renfermée sur elle-même, ignorante de ce qui se passe
à l'extérieur, et au seuil de l'écroulement,
de la décadence, non seulement à cause des évènements
en dehors du château royal –des évènements
qu'on ne voit jamais- mais aussi en raison de la gangrène
qui ronge de l'intérieur.
Tout cela est fort bien montré mais à vrai dire, pas
tout à fait passionnant (réflexe de gauchiste ? on
s'en fout, de tous ces nantis et de leurs faux soucis) sauf si on
parvient à extrapoler la situation et y voir un exemple comme
un autre de l'implosion violente d'une société organisée,
par manque de clairvoyance et d'ouverture sur les autres.
Le vrai sujet est sans doute ailleurs, au-delà de l'Histoire
et de ses personnages célèbres (ou pas). Le récit
suit de tout près la jeune lectrice de la reine, Sidonie
Laborde, qui malgré ses origines roturières (on l'imagine)
est clairement du côté de la monarchie et ne comprend
pas plus que les membres de la cour ce qui est en train de se passer
à la Bastille et ailleurs. Elle est toute dévouée
à sa maîtresse, et dès lors, ce n'est plus Marie-Antoinette
que l'on voit, mais une star ou une femme de pouvoir qui exerce
une domination perverse sur les personnes qui travaillent pour elle.
C'est donc l'histoire d'une relation à sens unique, une admiration
sans bornes et troublante, d'autant plus que la jeune lectrice paraît
intelligente et fine et qu'on peut se trouver désolé
qu'elle n'ait pas plus de sens critique vis-à-vis d'une reine
frivole et inconséquente. Mais ce sont bien là des
réflexes actuels et anachroniques, il était sans doute
impensable à cette époque d'avoir du recul dans une
telle situation. Le film, par sa facture très contemporaine,
autorise pourtant ce regard. C'est à la fois sa force, et
sa limite.