Il ne se passe rien, ou presque.
Une poignée de personnages vivent de souvenirs, d’espoirs
de vie meilleure, d’illusions ou de résignations. Il
ne se passe rien et pourtant la façon dont Nassim Amaouche
caresse ses acteurs et son décor transforme l’ennui en
un poème de l’attente. Il ne se passe rien ou plutôt
si, plein de petits riens, des regards, des sourires, des accolades,
des paroles sans importance en apparence et qui bousculent, des silhouettes
se détachant dans la chaleur, un oud dans la nuit, le bruit
lancinant d’une machine imitée par le tambour, un homme
qui joue aux cartes avec le vent… C’est ce qu’on
appelle un film d’ambiance, avec des fulgurances, des idées
de mise en scène à la pelle pour rendre compte de cette
atmosphère de crépuscule d’une époque que
l'on regrette et qui ne reviendra pas, tout cela sans misérabilisme,
sans nostalgie sombre : ils sont tous en train de se construire une
nouvelle vie, ils ne s’apitoient pas sur leur sort, on sent
le réalisateur proche d’eux, en chacun d’eux. On
pense au roman magnifique de Mordillat, "les vivants et les morts",
en plus ramassé et moins riche en évènements,
bien sûr. On pense aussi, c’est inévitable avec
un décor pareil, à un western immobile, où les
coups de feu seraient remplacés par une brise légère,
quelques mots qui claquent, une voiture qui s’éloigne,
une ombre irréelle qui passe…
C’est un très beau film, tenant en équilibre sur
le fil des sentiments humains, loin au dessus d’un océan
d’ennui, sans jamais y tomber.