Lorsque quelques très jeunes
filles décident l'une après l'autre de tomber enceintes,
sans tenir compte des avis défavorables de leur entourage,
l'une des questions qui se pose, c'est le rôle des garçons.
Leur absence en tant que personnages est criante. Il n'y a que le
frère de l'une des filles à exister un tout petit peu.
Tous les autres sont éclipsés au profit de ces jeunes
filles, formidablement vivantes et crédibles, malgré
l'énormité de leur décision. Ce qui frappe d'ailleurs
dans celle-ci, c'est qu'elle est motivée moins par le désir
d'enfant que par celui de changer de vie, de ne pas reproduire le
quotidien de leur famille, qu'elles jugent morne et sans avantage.
Le film tient alors en équilibre entre d'une part la description
d'un malaise adolescent, presque classique, qu'on a pu voir par ailleurs,
et d'autre part, quelque chose de plus ténu, plus mystérieux,
une sorte de grâce, comme la douce assurance qu'on les jeunes
filles de pouvoir changer non seulement leur avenir, mais aussi un
peu du monde qui les entoure. Le récit patine parfois, les
lenteurs nécessaires et contemplatives ne sont pas toujours
bien dosées, les réactions des adultes ressemblent trop
à des clichés ou au moins à quelque chose de
très convenu et du coup, pas très crédible vis-à-vis
de la finesse avec laquelle tout ce qui concerne les filles est montré.
Mais l'impression générale est plutôt douce, un
mélange de mélancolie amère et d'espérance
joyeuse et déraisonnée. Cela interroge, sans doute de
façon pas très durable, qu'importe, voici un film tendre
doté d'un regard aimant sur ses personnages, sans forcément
ménager le spectateur.